Le Dit du Genji by Murasaki Shikibu

Auteur:Murasaki Shikibu
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature japonaise
Éditeur: Verdier
Publié: 2011-01-27T05:00:00+00:00

*

Sur ces entrefaites, passé le dix de la deuxième lune, la Princesse du Suzaku-in se transporta à la résidence de la Sixième Avenue. Le maître des lieux avait procédé aux préparatifs avec des attentions peu ordinaires. Dans l’avancée occidentale où on lui avait présenté les jeunes herbes, il avait fait dresser les rideaux, et sur les passages couverts qui la reliaient à la première et à la deuxième aile, tout jusqu’aux chambres des dames d’honneur, était aménagé et paré avec le plus grand soin. S’inspirant de l’étiquette qui préside à l’entrée au Palais d’une Épouse Impériale, l’on avait aussi apporté du mobilier du Palais de l’Empereur Retiré. Pour le cortège de la Princesse, toute description serait superflue. Son escorte était assurée par une foule de dignitaires. Le fameux Grand Conseiller, dont l’ambition avait été de gouverner sa maison, en était lui aussi, faisant contre mauvaise fortune bon cœur. À l’endroit où s’arrêta le char, Monseigneur l’accueillit en personne et la fit descendre, ce qui était encore une entorse aux usages courants. Comme il était malgré tout un sujet, l’étiquette lui imposait en tout des limites, si bien que ce fut une union des plus étranges, car si elle n’était une femme qui entrait au Palais, il n’était pas, lui, un « seigneur gendre » comme les autres.

Trois jours durant, de chez l’Empereur Retiré comme de chez le seigneur de céans, l’on fit assaut de courtoisies, des plus grandioses comme des plus surprenantes. Pour la dame de l’aile occidentale, c’était là une situation qu’elle ne pouvait accepter de gaieté de cœur. À dire vrai, il n’y avait guère de danger qu’elle fût supplantée sans recours, mais pour elle qui avait été accoutumée à régner sans partage, la venue d’une jeune personne dans la fleur de l’âge, qui avait l’avenir devant elle, avec un déploiement de faste que l’on ne pouvait traiter par le mépris, l’indisposait malgré qu’elle en eût, ce qui ne l’empêcha toutefois d’affecter une parfaite sérénité, si bien que la façon dont, au moment même de l’arrivée de la Princesse, elle veilla, en complet accord avec lui, aux plus infimes détails, sans la moindre trace d’humeur, la fit monter encore, si faire se pouvait, dans l’estime de Monseigneur. La Princesse en vérité était toute menue, et si peu développée pour son âge qu’avec son air de candeur enfantine, elle n’était rien de plus qu’une petite fille. Le souvenir lui revint du temps où il avait pris en charge la « parente du grémil » : autant celle-ci était vive d’esprit et répondait à son attente, autant ne voyait-il chez celle-là qu’une décourageante puérilité ; tant mieux, après tout, se dit-il, car sans doute serait-elle bien incapable de lui créer des embarras, mais tout de même, songeait-il en la regardant, sa manière d’être était par trop dépourvue d’attrait !

Ces trois jours-là, il se rendit aux appartements de la Princesse sans manquer une nuit, ce que la dame de céans, qui depuis des années n’était plus habituée à ce qu’il la délaissât de la sorte, supporta avec constance, mais non sans mélancolie.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.